Portraits de
parisiens
Eloïse Gilles, Duvelleroy
Dessins : Cassandre Montoriol
Dans le 7ème arrondissement de Paris, qu’il pleuve ou qu’il vente, il existe une rue discrète où l’on prend toujours un coup de soleil. Avec sa belle devanture jaune éclatante, la boutique Duvelleroy attire la lumière et les passants. Pousser la porte, c’est remonter le temps. Une aventure sentimentale et artisanale que l’on doit à Eloïse Gilles et Raphaëlle Le Baud, deux passionnées issues du monde du luxe et de la mode. En 2010, Eloise part à la recherche d’une belle endormie, une maison avec un passé et surtout un savoir-faire à laquelle elle souhaiterait redonner vie. Le hasard la mène dans le grenier de Michel Maignan qui a hérité de son grand-père le fond d’archives Duvelleroy, une maison d’éventails parisienne fondée en 1827. La découverte est à la hauteur de la réputation de la maison : grandiose ! Des catalogues d’origine, du mobilier des boutiques, des outils de fabrication, des croquis, des publicités… Tout a été préservé.
17, rue Amélie, Paris 7e
Accessoires de mode des belles élégantes en France au XVIIe, l’éventail est aussi un objet d’art. Les collaborations, déjà à l’époque, faisaient grand bruit. Et encore plus, lorsque des peintres renommés étaient invités à créer des modèles en pièce unique et transformaient cet objet usuel en œuvre d’art que l’on aimait à encadrer et exposer dans son hôtel particulier.
L’histoire de Duvelleroy débute en 1827. À l’époque, l’éventail n’est plus très à la mode même si le bal de la Duchesse de Berry le relance en 1829. Et pourtant, la maison devient en quelques années le fournisseur officiel de la reine Victoria. Honneur ultime, la ville de Paris lui passe régulièrement commande lorsque des premières dames sont de visite dans la capitale. Sa réputation est basée sur son savoir-faire extraordinaire en textile et la finesse de ses modèles (dont l’épaisseur ne dépasse pas les 9mm). Son fondateur, Jean-Pierre Duvelleroy ne cesse de déposer des brevets. C’est à lui que l’on doit l’amélioration de la technique du plissage à froid qui permet de plisser tous types de tissu. Le jaune est sa couleur fétiche et le soleil sa saison préféré. Il établit sa boutique parisienne passage du Panorama à côté de l’imprimeur Stern .
Avec leur DA, Léa Dassonville, Eloise et Raphaëlle relancent toute la création et renouent des liens avec de nombreux métiers d’art : brodeurs, doreurs, plumassiers… Le challenge est de taille, il faut non seulement se créer un réseau d’excellence dans l’artisanat mais redonner le goût de l’éventail à une clientèle qui l’a effacé de son quotidien. Heureusement, très vite, les commandes de grandes maisons du luxe arrivent et les collections se mettent en place avec une ligne permanente, une en petite série et la possibilité de commander en sur-mesure des pièces d’exception. Certains modèles nécessitent jusqu’à 100 heures de travail ! Fidèles à l’histoire de la maison, elles renouent aussi avec des artistes et lancent des collaborations avec notamment l’illustratrice Iris de Moüy, Marin Montagut ou encore José Lévy qui offre la possibilité de personnaliser soi-même son modèle à partir de 5 pipettes de peinture.
Aujourd’hui encore il y a un dialogue entre les archives et la nouvelle collection. Et depuis 3 ans, l’éventail revient entre de bonne main non seulement pour le côté fun de cet accessoire de mode mais aussi pour son côté pratique, une bonne alternative écolo à la canicule.
Sur rendez-vous, la maison ouvre ses archives aux curieuses.