Portraits de
parisiens
Denis Chainay, boucher charcutier
Il dit qu’il n’arrive pas à se faire à ce monde moderne. Depuis 35 ans qu’il travaille ici, il est vrai que son monde à changer. « En 82, tout a été racheté et peu à peu les anciens commerces ont fermé. Il y a avait même une crèmerie, elle a disparu. Après sont arrivés les grossistes en jean, puis les boutiques de textile tenues par les Chinois. C’était terrible, les camions de livraison bouchaient toute la rue. Eux aussi sont partis et ce sont les coiffeurs Afro qui se sont installés. Et aujourd’hui, il y a tous ces nouveaux commerçants qui font monter le prix des loyers. Ça devient dingue ici !
43, rue du Château d'Eau, 75010 Paris
01 42 39 66 40
La vague des nouveaux bouchers ? Ils font beaucoup de cinéma !
Son métier ? Il ne connait que ça. Il a commencé comme employé ici même avant de racheter le fond de commerce à son patron. Mais depuis les temps ont changé, il y a eu un désamour de la viande, puis l’arrivée de ces nouvelles stars de la boucherie. « C’est théâtral ! Attention, je ne dis pas qu’ils vendent de la mauvaise viande, mais justement, ils la vendent et bien, c’est pas les prix d’ici ! Nous, on travaille à l’ancienne. La qualité, c’est notre force ».
Je fais partie des monuments historiques, moi Madame !
Sa boutique aux murs recouverts de marbre date de 1912. Ils sont d’origine tout comme la jolie devanture en fer forgé qui donne une âme si nostalgique au lieu. « Le marbre ce n’était pas pour faire beau, mais un moyen de conserver la viande au frais. Aujourd’hui encore, c’est très efficace l’été ! Par contre l’hiver, on a froid ici ! ». Un cliché en noir et blanc du film La Traversée de Paris donne le ton et nous plonge dans le Paris d’hier.
On travaille en boutique devant les clients, on n’a pas de laboratoire.
Sa clientèle de quartier, elle, change. Les personnes âgées ? « Ben, y’en a plus beaucoup. C’est comme les gardiennes d’immeubles Portugaises qui préparaient la gamelle à leurs maris et nous achetaient beaucoup de viande. Aujourd’hui, les jeunes mangent différemment, ça cuisine moins. Il faudrait faire des plats préparés, mais moi c’est la boucherie qui m’intéresse ».